21 Jan
21Jan

Diverses cultures auréolent les sorciers, devins, et magiciens de forces occultes et aux pouvoirs extraordinaires. «El madjous » en arabe  ou mage en français, dont le nom est issu de la racine latine magus, proviendrait du persan magis, terme qui désignait autrefois les fidèles du culte de Zoroastre : une croyance païenne, vieille de plus de 3700 ans.

En langue arabe, le mage est également appelé : « el Seh’h’âr » ou « sâh’ir » ou encore « kahin » de l’hébreu « kohen »;  autant de superlatifs pour désigner cet être fascisant et craint et dont le savoir et le pouvoir dépassent l’entendement des communs des mortels. Son pouvoir relève à la fois du  sacré et du profane. Son éloquence le positionne en corollaire du poète « el châ’ir »; cette étroite relation se traduit la verve dont il fait preuve, lors des prédictions et divinations.

Tandis que la religion est une affaire d’hommes et de prophètes, la magie semble être l’apanage des femmes dans l’Afrique du nord préislamique et, à ce propos, Procope s’exprime comme suit : « il est interdit chez les maures aux hommes de prédire l’avenir : mais certaines femmes après avoir accompli des rites sacrés inspirés par l’esprit (divin), prophétisent l’avenir ni plus ni moins que les anciens oracles »

Dihiya, célèbre reine berbère du VIIe siècle et issue de la tribu des Djeraoua des Aurès, fut surnommée « Kahina » la devineresse. Il paraîtrait qu’elle professait le judaïsme et fascinait par sa beauté et son charme ensorceleurs. Sa renommée dépassa Ifrikiya et intriguait H’asan ibn No’man le conquérant omeyyade. Il en est ainsi pour Zeineb, el nefzaouine, Tanguit et Debou de la tribu des Ghomara dont Ibn Khaldoun rendit compte dans son ouvrage sur les Berbères. 

Dès l’avènement de l’islam, le magicien dans l’Afrique du nord se mit à asseoir sa légitimité dans la rigueur religieuse car il opère au nom d’Allah. « El taleb », sorte de sorcier bénéfique qui pratique la magie dite « positive » occupe la fonction du médecin grâce à « el idjasa » (certificat). Ainsi, lui et « el hakim » ( juge, médecin ) sont amalgamés et il en résulte une confusion des genres.

Il existe moult  professions assimilées à la sorcellerie; de fait, le barbier et le  forgeron sont perçus comme des agents de sciences occultes et ne sont recrutés que via une chaine de transmission de savoirs tel les astrologues et les géomanciens chez les Beni Niyat, les Beni Ades, les Beni Amer en Oranie et les Zkara de Oujda.

Êtres enchanteurs, semi légendaires ou se prétendant à la magie, peuplent l’imaginaire collectif du Nord Africain et façonnent « Cet incroyable besoin de croire ». Si la croyance commune en a jadis fait des magiciens; aujourd’hui c’est la religion qui, en l’écartant, le précise et le qualifie ».


 Leila Assas

 

  1. Edmond Douté  – Magie et religion   dans  l’Afrique du Nord –  Chapitre I – Magiciens et devins , Alger , ed  Adoplphe Jourdain , 1909
  2. Citation : Cet incroyable besoin de croire, essai de Julia Kristeva, Bayard 2007.
  3. Illustation : Tableau ésotérique d'Al Buni


Initialement publié sur Babzman.com


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